Ce que j'ai pensé de

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Des bouquins, et pas de place pour les ranger

dimanche 26 janvier 2014

Baise moi, de Virginie Despentes, chez J'ai Lu.

Après 40 pages de Baise Moi, de Virginie Despentes, qu'on peut trouver chez J'ai lu, j'avais du mal à comprendre pourquoi ce livre avait fait scandale. Un livre de série noire comme un autre, un peu crade, sans doute, mais une grosse femme qui se masturbe devant du porno et une jeunette qui traîne avec des dealers, vraiment, pas de quoi fouetter un chat.

Dix lignes plus tard, mon avis n'était plus le même. Après une scène de viol quasi insoutenable, le livre bascule vers un road trip sanglant et halluciné. Les deux héroïnes s'apportent la tendresse dont elles ont manqué de la part du monde, mais au lieu de les réconcilier avec lui, cette force nouvelle les entraîne dans une rage destructrice qui est même au-delà de la vengeance.

On a dit tout et n'importe quoi sur Baise Moi, et du coup, on n'a pas entendu grand-chose. Vingt ans après, le livre paraît étrangement moraliste : toute société a les monstres qu'elle mérite. Il n'y a pas de subversion derrière l'habillage trash et l'écriture rentre-dedans. Plutôt un avertissement : laisser pourrir les plus pauvres dans la drogue, la prostitution et la pornographie n'est pas très bon pour la santé d'une société.

Ce qui étonne, rétrospectivement, c'est que ça n'ait pas pété plus. Baise moi sort en 1994, en 1995 sort Paris Sous Les Bombes dans lequel NTM demande « mais qu'est ce qu'on attend pour foutre le feu ? », les émeutes démarrent un peu partout, et puis... rien ne change.

Ce qui étonne, finalement c'est que le livre ne soit pas plus explosif. Bien-sûr, certaines scènes sont excessives, presque insoutenables, mais Boris Vian était déjà bien limite dans J'irai cracher sur vos tombes. Et puis Baise moi n'est pas un livre foutraque, c'est un livre bien écrit, bizarrement attachant, et, paradoxalement, respectueux du lecteur, parce que les personnages y sont vrais, parce que les dialogues sonnent juste, parce que la fiction transcende la réalité sans la travestir.

Enfin, ce qui étonne, c'est la nostalgie qui nous saisit lorsqu'on referme le livre, parce que les années 90, aussi déprimantes qu'elles aient pu être n'étaient pas si désespérées. On trouvait du Virginie Despentes dans toutes les librairies de quartier, comme si  elle avait le pouvoir de faire bouger la société en lui faisant prendre conscience de ses marges. Aujourd'hui, on a fini par comprendre que tout le monde a conscience de tout, c'est juste que tout le monde s'en fout un peu. Mais je suppose que ceux qui avaient lu Vian dans les années 40 ou 50 se disaient la même chose de nos années 90. C'est peut-être pas l'époque, qui est désespérante, c'est peut-être nous qui sommes désespérés. Alors, pour retrouver un peu de la hargne naïve qui nous tenait debout, on peut se repasser les albums d'NTM en relisant Baise Moi, de Virginie Despentes, disponible par exemple chez J'ai lu.

La chronique audio est disponible ici.

Pour les ceusses qui se demandent, la chronique commencent sur la version du IV My People crew sur l'album "le clash" de NTM et se termine sur l'original de Paris Sous les bombes.

TL ; DR : Un classique de la subversion. Finalement, Baise-moi est un livre assez moral, et c'est notre époque actuelle qui semble assez déglinguée, désespérée.


3 commentaires:

  1. Tu dois bien être le seul à avoir réussi à me faire écouter du NTM...
    Et là tout de suite, je te ferais bien la même proposition que Virginie Despentes... ;)
    Mais on n'a probablement pas le droit de faire ce genre de commentaire sur un blog littéraire :)

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  2. En fait la question n'est pas tant qu'il s'agisse ou non d'un blog littéraire, mais plutôt que son auteur soit trop heureux en couple pour répondre à ce genre d'injonction autrement que par une chronique littéraire.

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  3. Oups, alors toutes mes excuses à madame pour ce commentaire déplacé lol.
    Mais tu m'as donné envie de lire "Baise-moi" et je suis allée acheter le livre.

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