Ce que j'ai pensé de

Ce que j'ai pensé de
Des bouquins, et pas de place pour les ranger

mercredi 2 décembre 2015

Élections


La nuit
Celle du long crépuscule
De son père et d'Élie
Ou celle brutale aussi
Clac tchakataks cruels
Kalachou Akbar et Bataclan
Terrasses éclats rafales
La nuit des clans
Vitrines cristal
La nuit des bonbonnes et des clous
La nuit des colonies
La nuit des fous
Les nuits
Appellent des vengeances
Auxquelles il faut se rendre sourd

Quand le cœur est trop lourd
Se souvenir qu'on pense
Aussi

La nuit des tireurs
Leur
Détermination trépanée
Lobotomie planifiée méthodique
L'horreur la gâchette mécanique
Un type à terre deux dix treize
Cent trente
Et ceux qui soufflent sur les braises
Discours fumeux des lendemains déchantent
Écrans fumée
L'info en continu distribue l'importance
Il faut se rendre sourd

Quand le cœur est trop lourd
Se souvenir qu'on pense
Aussi

Qui sont nos frères
Qu'est ce qui traverse nos frontières
Matières premières
Mais pas les mères, les sœurs
Je ne suis pas meilleur
Que toi
J'ai peur, moi aussi
J'ai aussi peur que toi
Autant du froid et de la faim
Que de ne plus avoir sur moi
Ce dont nous n'avons pas besoin
Et qu'on me publicise
Chaque jour
Il faut se rendre sourd

Quand le cœur est trop lourd
Se souvenir qu'on pense
Aussi

Mais putain
Il doit bien y avoir
Pour mon fils et le tien
Assez d'espoir
Assez de paix, de pain
Assez d'idées, et assez d'hommes de bien
Contre les piles de bulletins qui promettent
La sécurité pour demain
Et dès aujourd'hui
L'étincelle qui mène toujours à la nuit
Naïf, abruti
Les autres ? Tous pourris !
Les comptes en Suisse
À Singapour
Et c'est vrai
Et je sais leurs discours
Mais
Je veux me rendre sourd

Car mon cœur trop lourd me supplie
Pense, je n'en peux plus, moi
Pense,
Dis moi qu'on pense aussi

On choisit
Alors

Contre la mort
La vie
Le jour
Contre la nuit
Contre la peur
Si plus d'amour
Au moins
L'esprit

4 commentaires:

  1. Je ne sais pas trop comment qualifier ce que je viens de lire mais je suis assez secoué. Et c'est grand ton texte.

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  2. Merci. J'avais peur vraiment que ce soit ridicule ou récupérateur. En fait, j'ai éteint le radio, la télé, je n'ai rien écouté en me disant que toute cette agitation donnait son pouvoir à l'action des terroriste. Mais le petit déjeuner tout seul, sans la radio, j'ai tenu deux ou trois jours. Après, même si on parlait de plus de choses différentes, et si on pouvait mettre les choses en perspectives, avec ce qui se passe dans les pays d'où cela est téléguidé, quand j'ai entendu les sondages, je me suis mis à pleurer. C'est taré de pleurer pour des trucs politiques, de voir les gens ne pas réaliser qu'on est le pays d'Europe qui a le plus de député européens d'extrême droite. Mais le plus dingue c'est qu'au début je ne pigeais pas pourquoi je chialais. Ce n'est qu'en me posant que j'ai admis que c'était à cause de tout ça. Et le sentiment de ne rien pouvoir faire : les écrivains, c'est comme les économistes, ils sont bons pour raconter après les crises, mais pour empêcher que ça arrive, ils servent à rien.

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  3. Yo la Gousse,
    Comment tu gères ?
    Moi j'ai bien aimé. Comme je ne suis pas un habitué de la poésie, j'ai eu l'impression de lire des paroles de Noir Désir qui début. Je trouve que ça devient plus fluide, personnel et touchant sur la fin.
    Des bises

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  4. En fait, j'ai hésité à le poster, conscient que le début est un peu maladroit. Je ne fais pas lire ma poésie, d'habitude. Mais il y avait un côté "la part du colibri" à le publier.

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