Mensonges
d'été, ce sont sept nouvelles de Bernhard Schlink, parues chez
Folio, sept histoires de dissimulation, d'évitements, de petits
arrangements avec la vérité.
Ne
commencez pas le recueil par la première nouvelle, elle m'a semblé
d'un ennui mortel. Ses protagonistes sont antipathiques, le format,
trop long pour une nouvelle, trop court pour un roman, et l'histoire
de ce musicien qui rencontre une femme trop riche à son goût se
termine sans chute véritable. Mauvaise pioche ? La seconde
nouvelle, une histoire d'adultère manqué, fonctionne un peu mieux,
mais les personnages ne sont pas beaucoup plus attachants. Pourtant,
il faut tenir, tenir ou passer aux nouvelles suivantes.
Les
mensonges y deviennent plus énormes, leurs conséquences plus
lourdes, et, paradoxalement, le recueil s'allège. On ne peut pas
dire que la joie envahisse les pages, mais on décolle, juste assez
pour ne plus toucher terre, juste assez pour que plus aucune friction
ne permette de freiner les enchaînements et les engrenages. Plus les
protagonistes se plantent, se ratent, plus on a envie de les aider,
de les secourir, de les aimer.
Parce
que celui-ci tente de sauver son amour, sa vie de famille ou que
celui-là, escroc, voleur, peut-être même assassin est habité d'un
charme délicat.
Quant
aux trois dernières nouvelles, elles sont simplement bouleversantes.
On
voit un homme devenir un homme juste à temps, être lui-même,
enfin, juste avant de ne plus être du tout. Puis, un autre, et son
père, à la fois si tristement conforme à l'image que son fils se
fait, et autre, à jamais insaisissable. Le livre se termine par un
voyage vers le sud, celui d'une vieille femme qui a bâti sa vie sur
des souvenirs à double fond. Cette dernière nouvelle est la seule à
finir sur un retournement de situation inattendu, comme si Bernhard
Schlink voulait nous dire : « Bon, si je n'ai pas mis de
chute spectaculaire aux précédentes nouvelles, c'est que j'ai
choisi de ne pas le faire, de ne pas donner dans l’esbroufe. Mais
quand je veux... »
Peut-être
alors, que si les premières nouvelles m'ont paru si plates, c'est
parce que j'ai pris l'habitude des romans à rebondissements, et
qu'il faut du temps, tout comme il faut un peu de temps pour entrer
dans un film de Tarkhovski après avoir regardé d'une traite les 3
premières saisons de Prison Break ou de Walking Deads. Bien-sûr, on
aurait aimé, enfin, j'aurais aimé, que la tonalité du recueil ne
soit pas entièrement mélancolique. J'aurais aimé que l'écriture
de Bernhardt Schlink accepte un peu plus de relief. Mais c'est parce
que le style de ces Mensonges d'été, parus chez Folio Poche, est
parfois à la limite du lisse, que ce qui s'y reflète,
inexorablement, ce sont nos propres mensonges, les petites
compromissions avec lesquelles nous avons appris à composer.
Mensonges d'été, Bernard Schlink, chez Folio. 349 pages
La
chronique audio est disponible ici. Le fond sonore est un arrangement
à base de Bach qu'on entend dans Solaris de Tarkhovski, et que Bach
tient une place particulière dans une des nouvelles du recueil.
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