Ce que j'ai pensé de

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Des bouquins, et pas de place pour les ranger

samedi 5 octobre 2013

L'empreinte des choses Cassées, de Claire Gallois, paru au Livre de Poche

L'empreinte des choses cassées, de Claire Gallois, paru au Livre de Poche, c'est le discours d'une femme reçue à l'Académie Française. La quatrième de couverture nous le promet insolent, brusque et émouvant. Moi, en littérature, je suis prêt à tout accepter. Les enfants qui s'envolent après avoir mangé des limaces, les super-héros qui lancent des toiles d'araignée, et même le changement de sexe d'une héroïne élisabéthaine qui vit plus de quatre siècles. Mais un discours d'intronisation de 120 pages... Pour que ça marche, il faudrait vraiment une nécessité narrative impérieuse, ou alors qu'on ait envie d'y croire. Mais là, ça ne marche pas. Pas une seconde, pas une phrase à part la première.

« Mesdames, Messieurs... le protocole demande que ce discours en séance publique commence par un hommage au dernier mort en date, et l'usage voudrait que j'ajoute : ''dont j'ai scrupule à occuper la place''. »

Mais immédiatement, on comprend que Claire Gallois croit qu'il faut alourdir une phrase pour lui donner du poids. Et ça donne :

« Comme si, au cimetière, chacun n'ignorait pas son voisin, fût-il encore à clopiner loin de l'ambulance ou siégeant parmi vous. »

Je n'ai toujours pas compris ce qu'elle voulait dire.

D'ailleurs, je n'ai toujours pas compris quelle était la motivation de la narratrice : se faire élire à l'Académie Française dans le seul but de dire qu'on préfère ne pas y siéger ? On n'y croit pas. Les personnages secondaires ? Mari bourgeois et amis bohèmes ? On n'y croit pas. Le dénouement grotesque qui tente de racheter par un paternalisme néo-colonial un inutile détour islamophobe ? On n'y croit pas. Pour paraphraser le titre d'un autre roman de Claire Gallois, c'est un livre cousu de fil blanc. Pourtant, la quatrième de couverture nous vantait la « liberté cinglante avec laquelle [Claire Gallois] assemble le réel et l'imaginaire. » Je me suis donc senti autorisé, après la lecture du livre, à aller chercher quelles distinctions Claire Gallois, membre du jury du prix Femina, avait refusé avec panache. Et je suis tombé sur un billet du blog qu'elle tient sur le site de Mediapart :

« Le 2 mai, j’ai reçu une belle lettre signée à la main « Nicolas Sarkozy ». C’était donc entre les deux tours de l’élection présidentielle, alors que nos deux candidats n’avaient pas une minute à eux dans la course aux meetings. Je la garde précieusement, comme un collector. Qui sait si je ne suis pas la dernière à avoir été nommée « officier dans l’Ordre national du Mérite » par le président ? […] J’ai aussitôt accepté cette distinction : pour mon petit-fils de six ans, voir grand-mère décorée, c’est aussi beau que si on lui remettait l’épée-laser de Spiderman. »


On aurait aimé, enfin, j'aurais aimé, pouvoir ajouter quelque chose de positif à cette chronique. Mais Spiderman n'a pas d'épée laser et Claire Gallois me prive de la posture de subjectivité distanciée et bienveillante derrière laquelle j'ai en général la lâcheté de m'abriter. Non, si quelqu'un mérite d'être décoré, aux éditions du livre de Poche, c'est l'auteur des quatrièmes de couverture dont le talent m'a donné envie de lire l'empreinte des choses cassées, le dernier, et on l'espère, ultime, livre de Claire Gallois.

La chronique audio est disponible ici. Je ne sais pas si Des Poches Sous les Yeux en voudra, car ils ont une vraie envie de surtout soutenir les livres qu'ils ont aimés, et ils ont raison.

TL ; DR : un vrai scandale, un livre sans aucun intérêt, moralement douteux. À jeter sans l'ouvrir, même si on vous l'offre. 

2 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. ouch ! Bravo pour la distinction au gars qui fait les 4e de couv ! Ça me plait beaucoup ! Quant-à Spiderman, t'es sur qu'il a pas une tout petite épée-laser cachée quelque part ? genre une qu'il sort jamais, mais qui le rassure, dès fois qu'il se trouve en face de Han Solo, du coup on ne sait pas qu'il l'a, sauf les gens hyper bien renseignés parce qu'ils sont à l'académie française !

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